Comment finance-t-on une franchise ?

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Par Me Jean H. Gagnon

Comment finance-t-on une franchise ?

L'une des questions que se pose souvent un futur franchisé est celle de savoir si le financement d'une franchise s'effectue de façon différente que le financement d'une entreprise indépendante. 

De façon générale, l'on peut dire que les modes de financement d'une entreprise franchisée sont, dans la plupart des cas, les mêmes que ceux utilisés pour une nouvelle entreprise indépendante. 

Par contre, dans certains cas, le franchisage peut affecter le financement de l'entreprise franchisée, notamment par une confiance accrue du banquier envers l'entreprise franchisée, un certain support du franchiseur dans l'obtention du financement auprès de la banque, une implication occasionnelle du franchiseur dans le financement de l'entreprise franchisée qui peut aller, dans certains cas, jusqu'à ce qu'une partie du financement soit effectuée par le franchiseur lui-même. 

Nous verrons donc sommairement ci-après certains aspects particuliers du financement d'une franchise. 

SOURCES TRADITIONNELLES DE FINANCEMENT 

Tout d'abord, dans la très vaste majorité des cas, le financement d'une franchise s'obtient de la même manière et auprès des mêmes sources que pour toute autre entreprise. 

Le franchisé devra donc tout d'abord faire appel aux sources traditionnelles de financement que sont: 

• Sa mise de fonds personnelle; 

• Une mise de fonds (ou un prêt) effectuée par des personnes qui lui sont proches; 

• Une mise de fonds faite par un ou des associés ou co-actionnaires, s'il y en a; 

• Un ou des emprunts obtenus pour les fins du fonds de roulement de l'entreprise (généralement par "ouverture de crédit"); 

• Un ou des emprunts obtenus pour faire l'achat des immobilisations et des inventaires de l'entreprise. Pour ce financement, beaucoup de franchisés font appel au programme gouvernemental de Prêt aux Petites Entreprises (communément connu anciennement par ses initiales "P.P.E.").(NDQF): aujourd'hui depuis 2015, par le Programme de financement des petites entreprises du Canada (PFPEC); 

• Un financement à court terme des fournisseurs, notamment par l'obtention d'ouvertures de crédit ou d'échelonnement dans le paiement des sommes dues aux divers fournisseurs. 

Donc, en premier lieu, le financement qu'obtiennent la plupart des franchisés peut être qualifié de traditionnel et obéit aux mêmes règles que celles que l'on retrouve pour une entreprise indépendante, notamment la nécessité pour le franchisé de préparer un plan d'affaires et des prévisions budgétaires et de convaincre un ou des banquiers de la viabilité de son projet et de la saine capitalisation de son entreprise. 

Selon le contexte du moment, le secteur d'activités de l'entreprise franchisée et certaines caractéristiques du franchisé lui-même, certains franchisés ont parfois accès à certains programmes gouvernementaux spécifiques pouvant faciliter le financement de leur entreprise.


SUPPORT DU FRANCHISEUR POUR LES FINS DE L'OBTENTION DU FINANCEMENT POUR L'ÉTABLISSEMENT FRANCHISÉ 

Le fait qu'une nouvelle entreprise soit franchisée plutôt qu'indépendante peut parfois faciliter l'obtention du financement requis par l'entrepreneur. 

Tout d'abord, au niveau de la confiance qu'accordera une source traditionnelle de financement (notamment un banquier) à la nouvelle entreprise, évidemment le fait que celle-ci soit franchisée peut avoir un impact positif sur le degré de confiance du banquier et, par voie de conséquence, sur la facilité pour le franchisé d'obtenir du financement ainsi que sur certaines conditions inhérentes à un tel financement (notamment en ce qui concerne le terme de paiement et le taux d'intérêt). 

Ce premier impact du franchisage sur le financement de l'entreprise franchisée dépend directement de la crédibilité et de la fiabilité du franchiseur. Plus le franchiseur présente un historique de succès et plus il bénéficie d'une crédibilité au niveau de la qualité de sa gestion, de son développement et de son processus de sélection de nouveaux franchisés et de nouveaux sites, plus ceci peut avoir un effet positif sur la décision qu'aura à prendre un banquier face à une demande de financement formulée par un franchisé. 

D'ailleurs, certains franchiseurs capitalisent sur cette crédibilité en convenant avec des banques et/ou d'autres institutions financières d'ententes globales concernant le financement de leurs franchisés. 

Telles ententes établissent des règles générales concernant le type de financement que la banque accordera aux franchisés du réseau et facilitent d'autant l'obtention du financement requis par tout nouveau franchisé. 

Cependant, l'existence d'une telle entente entre un franchiseur et une banque ne dispense pas le franchisé de faire ses devoirs auprès de la banque et de suivre toutes les démarches requises ainsi que de rencontrer tous les critères prescrits par la banque pour l'obtention de son financement. 

L'entente globale entre le franchiseur et la banque ne fera qu'établir un processus général quant au financement généralement requis pour les nouvelles franchises et quant aux qualifications qui seront exigées des nouveaux franchisés pour l'obtention de tel financement, sans pour autant signifier que la banque acceptera nécessairement toute nouvelle demande de financement formulée par un franchisé. 

Aussi, certains franchiseurs concluent des ententes additionnelles avec leur banque afin de faciliter le financement de leurs franchisés. L'une d'entre elles prend la forme d'une "lettre de confort" par laquelle le franchiseur conviendra de collaborer avec la banque afin de reprendre lui-même les opérations de l'établissement franchisé ou de trouver un nouveau franchisé pour remplacer tout franchisé qui fait défaut à ses obligations financières vis-à-vis la banque. 

Également, certains franchiseurs concluent des ententes spécifiques par lesquelles ils s'engagent notamment à racheter certains actifs (généralement les stocks) de la banque dans l'éventualité où la banque devait les reprendre par suite d'un défaut du franchisé à ses obligations vis-à-vis la banque. 

La conclusion entre le franchiseur et la banque de telles ententes peut évidemment faciliter l'obtention par le franchisé de son financement. 


FINANCEMENT OFFERT PAR CERTAINS FRANCHISEURS 

Dans la vaste majorité des cas, les franchiseurs n'offrent eux-mêmes aucun financement à leurs franchisés. 

Cependant, un tel financement pourra être offert par un franchiseur à un franchisé dans certaines circonstances particulières. 

La plus fréquente de ces circonstances est celle où le franchiseur recherche activement des candidats franchisés qui possèdent certaines qualifications propres (notamment, des permis professionnels, des licences, une expertise ou certaines qualités nécessaires à l'exploitation des établissements franchisés) alors qu'il n'y a que peu de personnes qui possèdent à la fois les qualifications recherchées par le franchiseur et des capitaux suffisants pour démarrer une franchise qui ne serait financée que de façon traditionnelle. 

Ainsi, dans certains secteurs d'activités spécialisés (par exemple, les pharmacies) ainsi que dans certains secteurs où l'implication immédiate et quotidienne du franchisé est nécessaire (par exemple, les dépanneurs), l'on verra des franchiseurs participer directement au financement de certaines entreprises franchisées. 

Une telle participation de la part d'un franchiseur ne s'effectue généralement pas sous la forme d'un prêt traditionnel mais plutôt par la location d'équipements ou d'aménagements ou par la vente par consignation de stocks ou par un financement garanti sur les actifs du franchisé. 

À titre d'exemple, dans le cas d'un dépanneur, le franchiseur pourrait construire, aménager et équiper lui-même le dépanneur et le louer par la suite au franchisé complètement aménagé et équipé plutôt que de ne louer au franchisé qu'un local vide que le franchisé doit par la suite aménager et équiper à ses propres frais. 

Dans le cas des stocks, un franchiseur pourra acquérir les stocks requis pour l'établissement franchisé en son nom propre auprès des fournisseurs (bien que ceux-ci soient livrés directement au franchisé) pour ensuite refacturer le franchisé pour les stocks ainsi acquis tout en accordant au franchisé certaines conditions de paiement qui ne sont pas généralement disponibles auprès d'autres fournisseurs. 

D'autres formes de financement offert par certains franchiseurs dans des cas spécifiques (notamment dans le cas de vente d'établissements existants appartenant déjà au franchiseur ou récemment repris par celui-ci) peuvent prendre la forme de soldes de prix de vente, de paiements différés du droit initial de franchise, de reports de paiement de sommes dues au franchiseur (notamment au chapitre de la redevance) et d'échelonnement dans le temps de certaines obligations financières du franchisé.

Comme mentionné ci-dessus, de tels cas sont cependant plutôt rares et, dans la vaste majorité des situations, le franchisé doit se tourner vers les sources traditionnelles de financement plutôt que vers le franchiseur en ce qui concerne l'obtention des fonds requis pour la mise en place et l'exploitation de son entreprise franchisée. 


CONCLUSION 

Nous avons fait dans le présent article un court survol des principaux moyens de financer une entreprise franchisée. 

Évidemment, ce survol n'est pas exhaustif puisque les méthodes de financement d'une entreprise (quelle soit franchisée ou non) pourront varier considérablement selon l'importance de la mise de fonds du franchisé, le secteur d'activités dans lequel œuvre l'entreprise franchisée, l'importance du financement requis, la nature des actifs à financer et les perspectives de succès de l'entreprise franchisée. 

L'on peut cependant dire, sans risque de se tromper, que, dans tous les cas, le franchisé doit se faire assister lui-même d'un conseiller financier (généralement un comptable agréé ou un comptable général licencié) qualifié dans le type d'entreprise qu'il désire exploiter et établir (avec l'aide de ce conseiller) un plan d'affaires complet qui lui servira d'outil de base autant pour l'obtention du financement requis que pour le lancement et l'exploitation de son entreprise. 

Trop souvent, de nouveaux franchisés se lancent dans l'aventure du franchisage sans avoir pris le soin d'établir un plan d'affaires solide et complet en se fiant un peu aveuglément sur les données qui leur sont proposées par le franchiseur ainsi que sur la facilité d'obtention des emprunts requis. 

Tout futur franchisé doit être conscient que le risque de son entreprise franchisée repose d'abord sur ses épaules et qu'il doit, comme tout autre entrepreneur, faire ses devoirs afin de vérifier à l'avance les perspectives de succès de son entreprise. La rédaction d'un plan d'affaires solide préparé par le franchisé lui-même (avec l'aide de son propre conseiller financier) m'apparaît primordial à cet égard. 

Certains franchiseurs offrent à leurs franchisés de préparer leur plan d'affaires ou de les assister dans la préparation de celui-ci. Bien qu'il s'agisse là d'une aide fort louable et précieuse, tout futur franchisé devrait considérer le plan d'affaires proposé par le franchiseur comme un guide ou un outil de base pour la préparation de son propre plan d'affaires et prendre soin de rédiger lui-même son plan d'affaires final dans lequel il vérifiera consciencieusement (avec l'assistance de son conseiller financier) toutes et chacune des données pertinentes et tous et chacun des renseignements qui lui sont proposés par le franchiseur afin de s'assurer qu'ils sont adéquats et qu'ils reflètent bien la réalité dans laquelle il devra œuvrer par la suite. 

Un plan d'affaires solide et complet est l'un des outils de base que doit utiliser le franchisé autant pour les fins d'obtenir du financement que pour les fins de prendre sa décision de signer une convention de franchise puisque, au delà de toutes les apparences, une entreprise franchisée est tout d'abord et avant tout une "ENTREPRISE" dans laquelle une personne ne doit se lancer qu'après avoir pris toutes les précautions requises autant sur le plan financier que sur le plan légal.